Perceval / Anne-Caroline Pandolfo, Terkel Risbjerg

De grands
à-plats de couleur pure nous introduisent dans la forêt oubliée dans
laquelle vit Perceval, un jeune homme dont la grande beauté trahit la
noblesse mais qui ignore tout de ses origines, jusqu’à son nom. Sa mère
lui a toujours interdit de sortir de la forêt, elle dit qu’il en
mourrait. Mais une pie bavarde attire un jour le garçon jusqu’à des
chevaliers du roi Arthur, qui passent dans les parages à la recherche
d’un homme en fuite. Ebloui par les armures rutilantes, le jeune homme
s’enquiert de l’endroit où peut se rencontrer le roi Arthur, qui serait
capable de le faire chevalier lui aussi… Hélas, sa mère a le coeur
brisé de le voir rêver de chevalerie. Elle s’est réfugiée dans la forêt
dans l’espoir de préserver son jeune fils, après avoir perdu son mari
et ses deux aînés dans le fracas des armes. La main qui le retient,
quoi qu’aimée, n’est que peu de choses, et Perceval s’en va.
Sa fougue et sa confiance en lui l’amènent jusqu’à la cour du roi
Arthur, où une jeune fille lui prédit un grand avenir. Elles le lancent
sur la piste du chevalier Vermeil, qu’il provoque en un duel
victorieux. Le voilà paré de la belle armure qu’il convoitait, mais ça
ne suffit pas à faire un chevalier. Heureusement pour lui, Gornemant de
Goort, chevalier généreux, accepte de l’instruire pour faire de lui un
vrai chevalier : « si ton ennemi demande grâce, épargne sa
vie et fais-en don à ton roi. Tu dois respecter les femmes, dames ou
demoiselles, comme si elles étaient ta propre mère et celle du Christ
réunies. Désormais, ton âme est à Dieu, ta vie est à ton roi, seul ton
honneur reste à toi. »
Accompagné de sa pie, conscience
tentatrice, Perceval poursuit sa quête. Il voudrait retourner auprès de
sa mère, qu’il a laissée au plus mal. Il voudrait revenir auprès de la
belle Blanchefleur, qui lui a donné son coeur. Mais ses pas l’éloignent
toujours davantage de ce qu’il cherche… Jusqu’à ce soir singulier où il
est accueilli dans un château dont le seigneur se plaint des mêmes
douleurs au bas-ventre dont sa mère lui a dit que souffrait son propre
père. Au cours d’une soirée étrange, il voit passer des serviteurs qui
portent le Saint-Graal…
Cet album, adapté de
l’histoire racontée par Chrétien de Troyes, est plutôt fidèle à
l’histoire, n’était le regard décalé qu’introduit la pie, prête à
toutes les incorrections pour amener son compagnon vers l’aventure.
L’oiseau pose par exemple un œil critique sur le comportement de
Perceval par rapport aux femmes que le destin met sur son chemin :
« tu as remarqué comme les femmes tombent sur ton passage ? »
Le travail graphique et de mise en couleurs est très abouti, donnant un
album aussi beau à regarder qu’intéressant à lire. Le monde sous l’aile
de la pie, la forêt qui libère ou emprisonne, le découpage séquencé en
couleurs et rompu par la présence d’une silhouette qui se découpe
concourrent à faire de cette bande dessinée une œuvre riche, à
parcourir de lectures différentes (embrasser le tableau de la page,
focaliser sur un détail, revenir sur une expression…)
Un beau travail, à proposer dès le collège.
Références :
Perceval / Anne-Caroline Pandolfo, Terkel Risbjerg. Le Lombard, 2016. 19,99 €. 978-2-8036-7014-7.