Peau d’homme / Hubert, Zanzim

Dans une petite ville d’Italie,
quelque part au Moyen Age, une toute jeune fille à la peau blanche et
aux longs cheveux blond vénitien s’apprête à se marier. Elle regrette
un peu de ne pas pouvoir connaître son mari avant de devenir sa femme,
mais se console en se disant qu’elle aurait pu avoir à épouser le père…
Le marchandage n’a pas été trop défavorable finalement ! Sa
marraine la prend quelques jours chez elle avant le mariage, et lui
révèle un grand secret : les femmes de la famille se transmettent
de génération en génération une peau d’homme, qu’elles revêtent pour
découvrir les mystères de l’autre sexe. Bianca, un peu déroutée, se
glisse dans la peau de Lorenzo, dans l’espoir de découvrir qui est son
futur époux. D’abord déçue par le monde masculin qu’elle découvre en
abordant Giovanni dans les tavernes qu’il a l’habitude de fréquenter,
elle tombe vite amoureuse de lui… et réciproquement. Leur entente est
parfaite, d’esprit comme de corps. Malheureusement pour Bianca, car son
futur époux a trouvé l’amour de sa vie : Lorenzo. Or Bianca n’est
pas Lorenzo, du moins pas totalement ! Elle va cependant devoir
s’accommoder de la situation, et partager son époux avec cet autre
elle-même, au masculin. Elle n’est pas prête à s’apitoyer sur son sort,
ni à se contenter de la philosophie de sa mère « Ta marraine
disait : « la lucidité n’a pas de prix » Et bien, je
préfère un bonheur un peu bête. A quoi sert d’être lucide si ont ne
peut rien changer ? » Bianca veut vivre pleinement, et tant
pis si sa condition féminine est limitante. Son frère, prédicateur
apprécié, fait régner l’obscurantisme dans la ville ?
Bianca-Lorenzo se charge de rappeler aux bonnes gens que le bonheur
n’est pas dans la dévotion. Son mari préfère Lorenzo à Bianca ?
Elle prend un amant qui lui convienne à elle et pose ses conditions.
Ce conte médiéval qu’on dirait enluminé explore
subtilement la puissance féminine et l’équilibre nécessaire entre les
deux sexes, dont les lignes de partage sont plus complexes qu’il
pourrait sembler. Bianca est positive, résolue, ce qui ne l’empêche pas
de se poser des questions. Elle met à jour les contradictions
contemporaines liées à la question du genre, du corps, de la pudeur et
des contraintes que veulent lui imposer tous les obscurantismes. C’est
une petite musique pleine d’énergie qui habite cet album, à mettre dans
les mains des collégiens et des lycéens, pour nourrir leur réflexion
sur leur place et leurs relations de femmes et d’hommes dans ce monde.
Références :
Peau d’homme / Hubert, Zanzim. Glénat, 2020. 27 €. 978-2-344-01064-8.