Nos embellies / Gwénola Morizur, Marie Duvoisin
« On
avait l’air de trois éclopés de la vie, débarqués d’on ne sait où. Mais
pour le coup, on n’aurait pas pu mieux tomber ».
D’abord il y a
Lily, qui porte un enfant alors qu’elle n’a pas digéré sa propre
enfance, et dont le compagnon vient de lui apprendre qu’elle devrait
assumer pendant les vacances de Noël son neveu à lui, venu du Canada,
parce qu’il entre en studio avec son groupe (une occasion inespérée!)
En
second vient Balthazar, qui croit que sa mère l’a envoyé en France pour
se débarrasser de lui comme elle s’est séparée de son père, et qui
trouve dans la lecture du « Tour du monde en 80 jours » un
exutoire à ses chagrins de petit bonhomme de 7 ans.
Et en dernier
lieu, Jimmy, « un type tout droit sorti d’un film
d’épouvante », amateur de Jules Verne lui aussi, et qui
s’inscruste dans le voyage parce qu’il n’a pas un rond.
Tous les
trois font route vers l’Auvergne, sur un coup de tête de Lily qui
préfère montrer les montagnes de son enfance plutôt que la Tour Eiffel
au petit garçon doit la charge lui échoit brutalement. Mais la neige
est tombée en abondance, la nuit est là, et les routes se ressemblent.
La voiture finit dans le fossé, et les naufragés cognent à la porte
d’une ferme isolée. C’est toute la générosité du monde qui se lit dans
les yeux de l’homme qui leur ouvre la porte. Elle changera Lily comme
Jimmy, permettant à chacun d’ouvrir un peu son coeur, d’en faire sortir
quelques secrets (Jimmy est danseur à l’Opéra-Ballet de
Clermont-Ferrand, mais ses parents l’ont traité de tapette quand ils
l’ont appris, et lui ont coupé les vivres). Et surtout d’accepter
d’écouter leurs désirs profonds, même quand la vie leur fait croire
qu’ils en sont incapables.
Cette histoire n’est pas exempte de bons
sentiments, mais elle fait du bien car elle propose une morale de
l’indulgence et de l’exigence mêlées : « sois indulgente avec
toi-même. Et donne le meilleur. Toujours ». Elle ne brosse pas un
monde idéal, mais laisse à penser qu’on peut l’améliorer si on veut
s’en donner la peine.
Le trait réaliste et les couleurs chaudes nous
conduisent au plus près des personnages, pour un album qui, comme son
titre l’indique, fait du bien. A proposer aux lecteurs de lycée et LP
qui voudraient partager un moment chaleureux.
Références :
Nos embellies / Gwénola Morizur, Marie Duvoisin. Bamboo, 2018. (Grand Angle). 978-2-8189-4461-5. 16,90€.