Magasin général, 9. Notre-Dame des Lacs / Régis Loisel, Jean-Louis Tripp
Toutes le
bonnes choses ont une fin, et même si je ne suis jamais enchantée par
les séries qui durent (assez souvent juste pour faire vendre quelques
tomes supplémentaire), c'est avec un rien de nostalgie que je tourne
les dernières pages du « Magasin Général ». Il se feuillette
d'ailleurs à la fin comme un album de famille au sens propre du terme,
puisque ce tome se clôt par un album photo dessiné, manière de dire au
revoir en douceur à ces personnages familiers, d'imaginer la suite de
leur vie et d'ouvrir sur d'autres époques...
Il ne s'est pourtant pas passé très longtemps depuis que Serge a
débarqué à Notre-Dame-des-Lacs, un an seulement... mais tant de
changements ! L'ouverture du restaurant français, la mémorable
soirée d'élection qui a laissé le bourg sans maire, le séjour de Marie
à Montréal... Cet hiver-là, tant de choses ont changé ! Pendant
que les maris sont au bois, les femmes se font belles grâce aux doigts
de fée d'Alcide et aux jolies robes « de Montréal ». Pas
seulement pour se faire plaisir à elle-mêmes, mais aussi pour leurs
hommes qui reviennent au printemps. Jusqu'aux Madames Gladu elle-mêmes
qui n'hésitent plus à commettre avec délectation un vilain péché de
gourmandise qu'elles iront laver en confession... on mesure le chemin
parcouru ! Tout cela est presque un peu trop beau, mais comme dans
toutes les bonnes histoires, même si on sait que c'est inventé, on aime
y croire.
« On est-tu assez pogné avec
c'te maudite idée-là !? Que dans la vie, on aurait pas le droit
d'avoir du fun ! Qu'y a rien que l'travail... Pis qu'avoir du
plaisir... ce s'rait un péché mortel ! On nous l'a-tu assez
répété, qu'on était un peuple né pour un p'tit pain ! »
Alors oui, c'est peut-être un peu trop beau, cette communauté qui se
serre les coudes, cette veuve mère de deux jumeaux dont elle ne connaît
pas le père, et qu'un étranger (vivant harmonieusement – quoi que
discrètement – une relation homosexuelle avec un prêtre humaniste)
adopte comme ses enfants... Ces vieux couples qui se rapprochent, ce
grand simplet qui trouve sa place dans la drôle de famille. Mais
pourquoi pas, si ça fait du bien ! L'ambiance y contribue
également, autant par la langue colorée du Québec des années 20, que
par le trait sensible qu'ont inventé ensemble Jean-Louis Tripp et Régis
Loisel, coloré avec délicatesse.
Si vous
étiez passés à côté, il n'est pas trop tard pour commencer la série,
accessible dès le collège et lisible en lycée et bien après !
Références :
Magasin général, 9. Notre-Dame-des-Lacs / Régis Loisel, Jean-Louis Tripp, 2014. 978-2-203-06210-8. 16,50 €.