Lincoln / Olivier Jouvray, Jérôme Jouvray, Anne-Claire Jouvray


Couverture de l'album
    Pour Lincoln, tout a mal tourné. Pas de parents ou presque, une vie mal fichue dans un village du fond de l’Amérique, et une colère à tout casser. « Je m’appelle Lincoln, c’est pas mon vrai nom, d’ailleurs je l’ai jamais su car on m’a toujours appelé Crâne de bois ! Si j’ai choisi Lincoln, c’est parce que celui-là quand il l’ouvrait, ils devaient tous la fermer autour de lui ». Parti sur de bonnes bases, Lincoln se fait jeter de son village natal et entreprend d’extorquer à la vie tout ce qu’elle peut donner sans rien rendre en échange. Jusqu’à ce qu’il fasse au bord de l’eau une rencontre inopinée avec Dieu en personne, petit bonhomme barbu vêtu d’un poncho mexicain. Perturbé par le nihilisme de Lincoln, Dieu a décidé de descendre voir, un peu pour essayer de comprendre, beaucoup pour essayer d’infléchir le cours des choses. Mais Lincoln n’entend pas se laisser infléchir. Tout juste accepte-t-il l’immortalité (histoire de voir si l’Autre ne lui raconte pas de bobards), ainsi qu’un bon paquet de billets. Après quoi il s’empresse d’expérimenter tout ce qu’il peut l’être (jeu, boisson, filles, braquages…), jusqu’à ce qu’on lui mette la main au collet et qu’on lui récite en guise d’oraison funèbre la liste des griefs retenus contre lui : « pour avoir cambriolé et saccagé une armurerie, volé un cheval, fait usage d’un couvre-chef qui n’était pas le sien, incendié une grange, traversé en dehors des clous, dépouillé de ses biens une communauté religieuse, cultivé et usé de stupéfiants et pêché à la dynamite… Pour avoir pratiqué des impostures au télégraphe, provoqué bagarres et tapages nocturnes, fait dérailler un train et cambriolé ses passagers, dévalisé une banque, un épicier et une autre armurerie… Pour recel d’abus de biens sociaux, fausses factures, trafic d’influence, abus de confiance, faux et usage de faux, trafic d’organes… Pour avoir démuni les voyageurs d’une diligence, piqué le sac d’une petite vieille, giflé un enfant en bas âge, blasphémé dans une église, uriné sur la voie publique et insulté les représentants de l’ordre… » Tandis que son pote le Diable s’intéresse à la question (« tu es sûr de contrôler la situation ? »), Dieu observe d’un œil attentif son expérience qui se poursuit. Après avoir vérifié par la tombe que Dieu ne lui a pas menti, Lincoln se pose la question inévitable : que faire de son immortalité ?  Et s’il acceptait finalement la proposition de l’autre fou au poncho : devenir un héros, un modèle pour les générations futures ?
  
       Pourvue de nombreux prix, cette série plutôt drôle opte pour un trait gribouillé à la Johann Sfar qui fait contraste avec l’humour potache de certaines répliques ou de certaines situations, mais qui rend bien la rudesse du Far West dans lequel se déroule l’histoire. Ce monde loin du paradis dans lequel déboule un Dieu insignifiant est traité avec un humour sombre qui fait écho aux teintes brunes dominantes. Lisible par de bons lecteurs de 4e et 3e, la série s’adresse plutôt aux lycéens, dont la plus grande maturité rendra plus savoureuse la lecture.




Références :
Lincoln. Olivier Jouvray, Jérôme Jouvray, Anne-Claire Jouvray. Paquet.
1- Crâne de bois, 2002. 11,50 €. 978-294019989-1.
2- Indian Tonic, 2003. 11.50 €. 978-294033426-1.
3- Playground, 2004. 11,50 €. 978-294033450-6.
4- Châtiment corporel, 2006. 11.50 €. 978-288890063-4.
5- Cul nu dans la plaine, 2007. 11.50 €. 978-288890151-8.
6- Fench Lover, 2009. 11.50 €. 978-288890325-3.
7- Le Fou sur la Montagne, 2012. 11.50 €. 978-288890453-3.