Là où vont les fourmis / Michel Plessix, Frank Le Gall
« Au
lieu d’aller à l’école comme les autres enfants, Saïd préférait passer
ses journées à suivre les fourmis qui remontaient à la queue leu leu le
long du caniveau. Il se demandait, plus que tout le monde, où pouvaient
se rendre les fourmis. Mais il n’en savait jamais rien, car il n’osait
pas dépasser la fontaine. Sa mère le lui avait défendu ». Un jour,
pourtant, Saïd va avoir la possibilité de sortir de son village, grâce
à la rencontre qu’il fait avec un vieil homme bourru qui l’emmene droit
dans le désert, au milieu de nulle part, et le plante là avec un
troupeau de chèvres à garder. Ce vieil homme, son grand-père, a un
pèlerinage à faire, puisque arrivant au soir de sa vie il n’est jamais
encore allé à La Mecque. Il laisse donc ses bêtes à Saïd, l’abandonnant
sous l’arbre qui a abrité tous ses jours depuis des années, en
compagnie d’une vieille chèvre et du troupeau. « Saïd lui, se
demandait à qui il devait dire adieu… A son grand-père ou bien à
lui-même ? »
Les jours s’ajoutant
aux jours, Saïd se résigne à cette morne existence, d’autant mieux
qu’il a découvert le secret de la vieille chèvre, Zakia : c’est
une chèvre enchantée, qui parle et philosophe à ses heures perdues (et
elle en a beaucoup). Avec elle, la vie a plus d’attrait au milieu du
désert. Les semaines passent, rythmées par les visites de ce grand
imbécile de Kahil, chargé de l’approvisionnement du jeune berger. Mais
il y a une chose à laquelle Saïd n’arrive pas à renoncer, c’est de
découvrir où s’en vont les fourmis. D’après Zakia, qui l’a vu en rêve,
elles vont toutes au même endroit : au bord de la mer, là où
tombent les étoiles filantes. Chacune dépose là le grain de sable
qu’elle porte, et ce grain de sable se transforme en tas d’or, formant
un très grand trésor sur la plage. A force de rêver, Saïd découvre le
moyen d’en avoir enfin le cœur net, avec l’aide de sa très sage chèvre
parlante.
Il faut entrer dans cet album,
ainsi que le suggèrent leurs auteurs, comme on entre dans un conte. On
y croise d’ailleurs quarante voleurs, une sorcière géante, une lanterne
magique… de multiples fragments de merveilleux qui tissent une
initiation douce avec une fin heureuse. Le trait caractéristique de
Michel Plessix se prête particulièrement au conte, on le sait depuis
« Le vent dans les saules ». Avec la mise en couleurs
harmonieuse de Sébastien Orsini, il tisse ici une jolie histoire pour
les plus (ou moins) jeunes – l’album fait partie de la sélection
2017-2018 du défi Babelio junior.
Références :
Là où vont les fourmis / Michel Plessix, Frank Le Gall. Casterman, 2016. 978-2-203-09821-3. 18 €.