L'homme qui tua Lucky luke / Matthieu Bonhomme

Couverture de l'album
  Tout y est : la silhouette du cow-boy le plus célèbre de la bande dessinée en train de tirer dans toutes les postures en pages de garde, la chanson finale, les jeux de couleurs tranchées avec des bichromies caractéristiques, la mèche, les défilés et les Indiens, l'attaque de la diligence... Matthieu Bonhomme (dont on connaît au CDI « Messire Guillaume ») s'est attaqué à une légende, mais surtout, comme il le dit lui-même, à « un compagnon de route, un ami d'enfance ». Il s'y attaque de biais, ce qui finalement est plus sûr quand on se lance le défi de poursuivre une série aussi mythique du 9e art. L'ouverture de l'album donne le ton : un coup de feu résonne dans le paysage ouvert d'une petite ville du Far West, quelqu'un crie : « j'l'ai eu bon Dieu ! J'ai tué Lucky Luke ! », alors qu'on découvre la silhouette familière à la chemise jaune et au foulard rouge écrasée face contre terre, dans la boue et les flaques de la rue principale.

    Matthieu Bonhomme, signant sa propre version de Lucky Luke, aurait-il osé ce que n'a jamais fait Morris, rendre vulnérable son héros, le descendre ? Le flash-back qui nous plonge dans l'histoire tisse lentement la réponse à cette question. On y découvre un cow-boy tout aussi solitaire, précis et engagé que son modèle. Un peu plus engagé même, capable d'expliquer aux enfants qui le pressent de raconter ses exploits que « c'est mal de tuer un homme, petit... tu lui retires tout ce qu'il a... et tout ce qu'il aurait pu avoir. » Clin d’œil aux pressions qui ont conduit le héros, notamment en dessin animé, à renoncer à sa fameuse cigarette, Lucky Luke passe tout l'album à chercher en vain du tabac. Hormis cette différence en guise de signature personnelle, et un trait plus réaliste que celui de Morris, cette nouvelle aventure poursuit sans faux-pas l'héritage, et nous ramène, nous lecteurs déjà bien adultes (!) à nos souvenirs d'enfance, ranimant tout un univers avec elle. Nul doute qu'elle donnera envie à nos jeunes lecteurs qui n'ouvrent pas spontanément des westerns de se plonger dans les albums de Morris, voire dans toute la BD de ce genre très riche, pour lequel cet album constitue une porte d'entrée privilégiée. Pour tous dès le collège, au lycée et LP.

Matthieu Bonhomme © LUCKY COMICS, 2016

Références :
L'homme qui tua Lucky Luke / Matthieu Bonhomme. Lucky comics, 2016. 14,99 €. 978-2884-71363-4.