La BD est Charlie / Collectif
Plusieurs
mois après les attentats de janvier 2015, proposer ce recueil dans les
rayons du CDI peut être une manière de participer au travail de longue
haleine qu'est l'éducation du citoyen, en particulier l'éducation aux
médias et à l'information. Publié dès janvier 2015, ce livre est
composé de dessins proposés spontanément par des illustrateurs ou
dessinateurs de presse à la suite des attentats. Auteurs et éditeurs
(une quarantaine de maisons) ont offert leur travail pour cet album
dont les ventes sont destinées aux familles des 17 victimes.
Revoir ces dessins est une expérience singulière : nombre d'entre
eux ont circulé largement sur Internet, certains ont été publiés dans
la presse, plusieurs figurent même dans les dossiers pédagogiques
préparés suite aux événements par le Clemi ou Cartooning for Peace.
Beaucoup de grandes signatures de la bande dessinée ou du dessin de
presse sont parmi les auteurs (Robert Crumb, Mordillo, Pessin, Zep...)
Des thématiques émergent, tel le crayon comme une arme, décliné sous de
multiples variations, ou la reprise voire le détournement du slogan
« Je suis Charlie ». Quelques contributions s'interrogent sur
la mission du dessinateur dans la tourmente, tel Frédéric Peeters, dont
l'auteur saisi regarde sa propre main, celle qui tient le crayon,
sectionnée au niveau du poignet. D'autres évoquent les personnalités
disparues, en imaginant un Saint Pierre consterné (« ils ont déjà
dessiné des bites partout »), ou une brève de comptoir évoquant
Bernard Maris (« Des dessinateurs, y en a plein... Mais des
économistes de gauche, c'est pas une espèce protégée,
ça ?! ») Certains sont de purs dessins d'illustration de
presse (reportage dans la manifestation notamment), d'autres des
moments de poésie plus ou moins noire. Fidèles à eux-mêmes, certains
sont des uppercuts, tel les deux dessinateurs moyens de Manu Larcenet
imaginant ce que sont devenus les auteurs assassinés. D'autres sont
plus franchement mélancoliques, comme le dessinateur d'Obion, qui se
penche avec consternation sur la production dessinée en hommage aux
victimes, qui abonde sur le net : « Mais où sont nos
meilleurs caricaturistes ?... Ah oui, merde... »
Ils voulaient dessiner non pour « faire de l'humour », mais
pour « rire, (…) faire rire sans entrave, sans tabous et sans
prétendre réformer les mœurs ou la morale » (Cavanna, 2012). Cet
hommage à un geste essentiel de la liberté d'expression est utile dans
nos établissements pour mettre en perspective, susciter la réflexion,
rappeler l'ignominie de cet événement qui a secoué notre pays. Dès le
collège, en LP et lycée.
Références :
La BD est Charlie / Collectif. Glénat (éditeur délégué), 2015. 10,00 € . 978-2-344-00934-5.